Nous sommes dimanche, le soleil est au plus haut en cette fin février. Jamais je n’avais vu un ciel si bleu ! La température est fraîche, seulement quelques petits degrés au-dessus de zéro mais qu’importe : quel bonheur de pouvoir profiter d’une si belle lumière et de si vastes paysages en plein éveil. En effet, le printemps pointe le bout de son nez. Les arbres commencent à bourgeonner, les oiseaux reviennent et les derniers perce-neiges laissent place aux premières jonquilles. En bref, le temps parfait pour une randonnée dans les Monts de Flandre. Pour se faire, en tant que pur urbain Lillois, direction la Flandre Franco-Belge et ses belles plaines que seuls quelques monts viennent perturber.
Avant l’effort, le réconfort
Le départ se fera depuis l’estaminet De Tere Plekke à Heuvelland en Belgique. Le côté Belge est vraiment peu perceptible : le personnel est majoritairement Français et le panneau indiquant la frontière ne se trouve qu’à une cinquantaine de pas seulement.
Cet estaminet, c’est mon premier. En tout cas le premier VERITABLE estaminet. Puisqu’en bon Lillois que je suis, j’ai déjà évidemment testé les nombreuses adresses de la capitale des Flandres. Mais, dit-on, les vrais estaminets ne se rencontrent qu’après Armentières. Je dois avouer que l’image de carte postale que je me faisais de ces restaurants typiques est bien au rendez-vous. De Tere Plekke est sûrement une ancienne ferme. C’est une bâtisse typiquement Flamande, c’est-à-dire basse et constituée de tuiles et de briques rouges évidemment. Les huisseries peintes en vert foncé et en rouge se marient très bien à la dense végétation qui règne dans le jardinet.
Un lieu mémorable

Je pousse la porte, plus basse que mon mètre quatre-vingt-sept, et j’arrive dans une salle où l’atmosphère est déjà inoubliable. Ici, les rires croisent les verres de bière Trappiste qui s’entrechoquent et les bruits des couverts qui caressent la vaisselle en porcelaine peinent à couvrir les discussions visiblement engagées. Un estaminet pour moi c’était bien ça : de grandes tablées qui parlent fort, qui ne se laissent pas prier devant une carbonade ou une tartine au Vieux-Bergues et qui ont les joues rosées puisque réchauffées par le poêle à bois et les quelques bières triples dégustées.
Côté déco, là encore c’est une parfaite image d’Épinal. Les lianes de houblon surannées s’entortillent autour des balustrades en chêne, la vaisselle à motif et les cafetières en fer se partagent la décoration murale avec quelques plaques émaillées de brasseries régionales. Au centre de la pièce le feu réchauffe les promeneurs au même titre que les rayons du soleil qui percent les petites lucarnes de la mezzanine. Côté addition, c’est bien raisonnable. Une cinquantaine d’euros pour 4 bières, une planche et deux plats.
Après les plats régionaux, la marche digestive s’impose
La marche peut démarrer. Nous partons du parking de l’estaminet qui – originalité à souligner – est voisin d’un vignoble. Nous prenons la direction du Mont Noir en passant par la Guesne Straete. A peine quelques centaines de mètres parcourus et la thématique du jour qu’est la bière nous est déjà rappelée. Nous passons en effet devant notre fleuriste préférée, Houbline. Cette entreprise gérée par Sabine et Sophie propose des compositions de fleurs séchées à la vente mais aussi des ateliers « Do it yourself » dans leur ancienne ferme pour apprendre à décorer son intérieur à l’aide de confections que vous pourrez élaborer vous-même. Pourquoi ce nom ? Il s’agit de la contraction de houblon et de lin, deux végétaux qu’elles affectionnent tout particulièrement et qui s’épanouissent dans la région.
Depuis cet atelier, on observe un spectacle intriguant. Au loin vers le Nord-Est semblent apparaître… des remontées mécaniques ! Bien intriguant en ces paysages relativement plats et jouissant d’une météo relativement douce (littoral à 30 minutes oblige). Après quelques recherches, je ne rêvais pas ! Il s’agit bien de remontées et elles se trouvent de l’autre côté de la frontière sur la commune de Heuvelland au départ du café « Kabelbaan Cordoba ». Cette installation datant de 1957 permet de gravir le mont rouge voisin et ses 135 mètres en une quinzaine de minutes. Spectacle garanti.
Parce qu’une petite dose de culture ne fait jamais de mal
La promenade continue et 600 mètres plus loin nous pénétrons dans une petite forêt équipée de sentiers bien aménagés. Après une dizaine de minutes à travers bois, une immense villa surgit face à nous. Il ne faudra pas de longues recherches pour comprendre qu’il s’agit d’un manoir néo-normand construit dans les années 1930 qui abrite aujourd’hui un espace dédié à la littérature et aux arts. Le parc qui entoure la villa porte le nom d’une écrivaine Flamande : Marguerite Cleenewerck de Crayencour, plus connue sous le nom de Marguerite Yourcenar (anagramme de Crayencour). Et il ne le porte pas par hasard, puisque vous êtes ici sur le terrain ayant longtemps appartenu à sa famille qui y fit élever un château en 1824 et qu’elle fréquenta de 1909 à 1913 avant sa démolition durant la première guerre mondiale.
Différents itinéraires plus ou moins long sont proposés dans le parc. De notre côté nous prenons le chemin des étangs des 3 fontaines situés en contrebas, un véritable paradis pour pêcheurs. En sortant du parc nous prenons la direction de Saint-Jans-Cappel par la rue Chieux qui perce les champs de maïs. Ce village sera l’occasion idéale pour en apprendre plus sur la vie de la célèbre écrivaine, qui fut la première femme à entrer à l’Académie Française. Le petit musée qui lui est dédié est situé dans une bâtisse rouge typique au cœur du village et ouvre le dimanche de 15h30 à 17h30.
Après la courte visite (comptez 35 minutes), nous rejoignons le chemin de la Glaise jusqu’à la D223 où nous choisissons de poursuivre notre chemin tout droit par la Poperinghe Cruysse Straete jusqu’à croiser à nouveau la route de l’atelier Houbline. A partir de là, retournez à l’estaminet pour une bière bien méritée (ouverture en continu le dimanche de midi à 22h).
Pour quel public ?
Cette balade, plus qu’une randonnée, est accessible au plus grand nombre. Comptez environ 2h15 pour 10 kilomètres sans les arrêts. Idéal en couple, en famille avec enfants ou avec des amis.
Ce que j’ai particulièrement apprécié
- Découvrir des petites choses partout qui contribuent à illuminer le parcours.
- Le point de vue époustouflant à proximité de la villa ! On peut même apercevoir les terrils du bassin minier situés à 50 kilomètres.
- Le parc Marguerite Yourcenar très bien entretenu.
- La petite dose de culture très accessible entre la villa et le musée.
- Le cadre de l’estaminet : une vraie carte postale.
- La belle carte des bières de l’estaminet et la gentillesse du personnel.